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« Travail, les raisons de la colère »

Voici une excellente interview de 50 minutes conduite par Michel Lacombe pour Radio-Canada, dans le cadre de la sortie du livre de Vincent De GAULEJAC « Travail, les raisons de la colère « . Si je vous la propose, c’est qu’il n’est pas question ici de répercuter pour la énième fois des mesures de mal-être au travail, mais plutôt de comprendre les dynamiques générales qui l’induisent. Ce directeur du Laboratoire du Changement Social à l’Université de Paris met en lumière des points qu’il est important d’avoir à l’esprit lorsqu’on ouvre un œil sur les problématiques des hommes et du travail, et que l’on est en quête de solutions.

Aussi, il n’est pas question de fatalité ici. Ni de s’indigner contre la mondialisation ou des instances atteignables, ce serait se tromper de direction. A échelle plus réduite, et donc humaine, c’est la question du rapport au travail qui est à considérer et Vincent de Gaulejac l’explique très clairement !

Je vous invite donc à cliquer sur « VIDEO « . Pour accompagner votre écoute, j’ai procédé à une découpe et indiqué les temps et principaux points évoqués. Bonne écoute ! 😉

• Qu’est-ce que la « clinique« , sortie du champ médical classique, et quels sont ses intérêts en sociologie/psychologie du travail.

4’00 Un certaine conception idéologique de la gestion et ses conséquences sur les organisations. Paradigmes associés : objectivisme, utilitarisme, positivisme, haute performance. Déni de la nécessité de la réflexion critique et des disputes professionnelles. Répercussions somatiques par intériorisation des conflits.

8’45 Déplacement de la réflexion sur les moyens et pas sur la finalité. Service du personnel versus gestion des ressources humaines. Dans l’entreprise, qui est au service de qui dorénavant, qui est la ressource, l’instrument de qui ? L’entreprise devient une finalité à développer, avec l’homme pour la servir. Or c’est l’inverse qui devrait se faire .

• 11’30 Avec le temps (des années 60 à aujourd’hui), on est passé de la pénibilité physique à la pénibilité psychique.

• 14’00 Le cas des cadres. Réalités objectives de ce statut versus les perceptions subjectives du vécu de l’exercice de cette fonction.

• 14’50 Vécus de paradoxes récurrents comme les conflits éthiques et la perte de sens.

• 16’40 Changement du rapport entre capital et travail. Déterritorialisation mondiale du capital mais maintient de la territorialisation de la production = conflit de la finalité du travail avec des exigences économiques intenables humainement (quantitatif versus qualitatif)

• 18’00 « La mise à mort du travail » Jean-Robert VIALLET. Où la transformation du capitalisme financier change les exigences de la production et donc pèse sur le travail et la manière dont on le fait. La fierté que l’on en retire est annihilée. Les critères de qualités exigées ne sont plus ceux du travail bien fait.

• 22’00 Schumpeter « Le Capitalisme c’est la destruction créatrice ». Attention à ce qu’aujourd’hui la capitalisme devienne pas la création destructrice. Le travail de l’argent ne produit de valeur que pour une minorité, avec les conséquences qui en découlent (crise, production de pauvreté et souffrance au travail pour tenir les exigences etc…)

• 24’30 Exemples illustrant la création destructrice. Renault, France Télécom, IBM et Wall-Mart

• 27’30  Inspectrice du travail Sylvie Catala à propos de France Télécom.

• 29’00 Enquête Technologia : un questionnaire de 114 questions est proposé aux 1000.000 salariés de France Télécom. Sur base de volontariat, 80% répondent ! Marque de motivation à ce que les choses changent.

• 34’30 In Search Of Excellence. Peter & Waterman (McKinsey) 2001.

• 35’30 Peter critique son propre livre In Search Of Excellence en publiant de nouveau en 2008.

• 37’30 La question du harcèlement. Est-ce davantage un problème de personne ou un problème de système managérial harcelant ?

• 40’35 La question de la crise. Est-elle transitoire ? Non. Elle est structurelle. S’agit-il d’une crise d’argent ou d’une crise d’être au travail ? Les politiques managériales qui suivent les « lois » de rentabilités économiques, doivent trouver des moteurs motivationnels exogènes à l’homme. Peu puissantes, elles s’éteignent avec le temps puisque leurs bénéfices sont inférieurs aux sacrifices consentis pour les obtenir. En revanche, les politiques managériales qui fonctionnent selon les règles de comportements humains sont fortes et durables car les motivations intègrent l’adhésion au système organisationnel (motivations intrinsèques).

• 43’20 La question de la formation des élites.

• 44’30 Modèle alternatif du fonctionnement des coopératives espagnoles où sont conciliés les intérêts du capital et ceux du travail. Ces coopératives ont subi la crise de façon atténuée.

• 45’30 Critique du socialisme qui s’est trompé d’objectif : il s’est occupé de la question de l’emploi (et du chômage) plutôt que de la question du  rapport au travail (exemple : les 35 heures ont demandé de la flexibilité avec toutes les conséquences que cela a généré sur la santé humaine). Paradoxe avec l’acceptation des politiques managériales délétères pour favoriser l’emploi.

• 48’30 Premier prix de thèse du Sénat : Mme Aude HARLÉ, pour sa thèse intitulée : « Le coût et le goût de l’exercice du pouvoir politique – sociologie clinique des cabinets ministériels » – Université Paris Diderot-ParisVII, directeur de thèse : M. Vincent de GAULEJAC.. Cette thèse démontre quel est le mode de fonctionnement, la base idéologique de pensée des professionnels travaillant dans les ministères en France : cette base est finalement celle de l’idéologie de la gestion !

Emmanuelle PERRIER

Pour aller plus loin…

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Classé dans Management, Psychologie

Le sens de la reconnaissance

« Je ne m’y retrouve pas, je ne me reconnais pas dans ce que je fais, c’est pas moi ça ! »… Qui n’a jamais dit ou entendu pareille phrase, et vu dans quel état est celui qui parle ? Déboussolé oui !

En dehors des relations inter-personnelles au travail, il est une dimension trop rarement évoquée et pourtant vitale : la relation à soi-même. Celle-ci est aussi affaire de reconnaissance. Reconnaissance de soi par soi, parce qu’on s’utilise au travail, on y met son corps, sa tête, ses affects. Énergie, valeurs, croyances propres, tout ceci concourt à la réalisation de ce qu’il y a à faire ! Tant que le contrat peut se jouer, que l’on réussit à travailler correctement, alors le sentiment de satisfaction du travail accompli est là !

Dans le cas contraire, je pointe du doigt ce que nous connaissons bien en psy du travail : le conflit de critères sur la qualité du travail. Car les critères de qualité des gestionnaires qui commandent le travail à faire, et de ceux qui sont au charbon, ne sont pas toujours en phase… Exemples :

– Ne plus être en mesure d’établir une relation de confiance avec un client à cause d’une augmentation imposée des volumes de ventes, attaque la qualité du service à la vente.

– Ne plus avoir le temps d’écouter son patient à cause d’une surcharge de tâches par manque de personnel, attaque la qualité des soins et des relations.

– Passer de l’utilisation d’une matière noble à une matière de moindre coût dans la confection d’un produit, attaque la qualité de celui ci…

Autant d’images illustrant la dégradation du rapport à son travail. Qu’il s’agisse d’un conflit de critères de qualité, ou d’un conflit d’éthique en agissant contre ses convictions, les gestes et les valeurs du métier sont directement abîmés. Car le travail fonctionne comme un miroir, et renvoie un reflet valorisant lorsqu’on réussit à faire du bon boulot… ou pas, dans le cas contraire !

Patrons, comment se voient vos employés ? Car les conséquences néfastes sont manifestes. Être ainsi empêchée, manquer de marge de manœuvre alors que l’on aime viscéralement son métier, fait perdre le sens du travail et désengage vis à vis de l’entreprise. C’est comme s’il y avait une lutte dans la tête : on veut faire bien mais on ne peut pas. Une lutte dans le cœur aussi : on aime son métier mais on n’a plus la main pour le faire dans les règles. En psy on dit « être en dissonance » quand on vit une telle opposition psychique. Et ça épuise.

C’est ainsi qu’en consultation en psychologie ou en médecine, les décompensations psychiques les plus remarquables sont souvent constatées chez les personnes ayant une éthique et une conscience professionnelles fortes, et reconnues comme étant des modèles par leur pairs. Et oui, oubliez donc toutes ces balivernes qui disent que ce sont les sujets « fragiles » qui craquent les premiers ! Et gardez bien en tête que derrière une revendication de non-reconnaissance, se cache finalement bien des subtilités. Les percevoir marque le début d’une voie de solution possible.

Emmanuelle PERRIER

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Dodo au boulot : passez à l’acte !

Dodo au boulot : passez à l’acte !

Dodo entre 10 et 30 mn, tout ce que vous récupèrerez en énergie vous rendra plus efficace !
Managers, leaders : préserver la santé de vos collaborateurs c’est aussi préserver la santé de votre entreprise !
Hop hop hop, passez à l’acte !

Extrait de ma curation Stress et Travail.

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Techniques de Management Pathogènes


Image by Bent Objects

Prenez bien garde en lisant cet article sur les techniques managériales pathogènes de tenir compte de la dimension du temps : les effets des techniques de management ne sont pas les mêmes s’il s’agit d’un fait ponctuel ou d’une politique au long court.

Extrait de ma curation Stress & Travail.

Pour aller plus loin… 

Emmanuelle PERRIER

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Dopage des cadres : quels shoots pour quels effets & risques


Image by Bent Objects

Bien que cet article soit ancien, il brosse tout de même un tableau des risques encourus à consommer des psychotropes pour réussir à faire face à son travail.

L’heure n’est pas au blâme ni au jugement : il convient plutôt de se demander ce que l’on ne supporte plus au travail pour avoir besoin de se doper.

Une précision pour ceux que cette introspection inquiète ou rebute : les psychologues et médecins du travail ne recherchent pas les limites de l’homme. Il est plutôt question de comprendre ce que l’organisation du travail ne donne pas comme moyens pour permettre de faire son activité correctement. Et demandez-vous « quand » vous vous êtes sentis perdre pied pour comprendre.

Extrait de ma curation Stress & Travail.

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Stress & burn out : à Sciences Po. aussi potentiellement


La prestigieuse école de Paris, qui s’est fortement développée en dix ans, « risque de s’épuiser » s’il n’est pas davantage porté attention au stress des salariés, prévient Technologia.

Extrait de ma curation Stress & Travail et Pour aller plus loin…

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Hôpital malade… (bis)

Ce que j’en dis dans ce billet, est confirmé sans surprise dans cet article. 2 suicides et un accident d’urgentiste en 3 jours, on va où là ?
De plus, les impasses liées aux difficultés à travailler, c’est-à-dire à prodiguer des soins dans de bonnes conditions physiques (les gardes sont longues) et psychologiques, ouvrent directement la voie aux conflits entre personnes…

Si le climat social dans votre service, au bureau ou en atelier est tendu, cherchez du côté de vos conditions de travail !

Extrait de ma curation Stress & Travail.

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Hôpital malade : suicide d’un médecin, encore.

La mise en place de la nouvelle gouvernance du Plan Hôpital 2007 a fait basculer les établissements hospitaliers d’une logique de soin à une logique de résultats (avec une tarification à l’acte T2A). Les services rendus plus autonomes dans la gestion de leur budget doivent ainsi subvenir à leurs propres besoins matériels. Cette nouvelle orchestration économique implique des transformations organisationnelles et fonctionnelles profondes. Les difficultés d’exercice des agents hospitaliers en sont accrues et diluent de fait leur vocation initiale de porter secours et assistance aux hommes.
Prendre soin des soignants pour qu’ils prennent soin de nous…

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Extrait de ma curation Stress & Travail.

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Epuisement professionnel : entre burn out et burn in


« L’épuisement professionnel » dit aussi classiquement « burn out » a dans cet
article 3 visages :

– Je suis frénétique, dans un rythme fou de suractivité, d’intensification de mon travail. Pour tenter de palier tout ça, je développe polyvalence et réactivité. Cool pour ma prochaine évaluation, mais bon, ouf, je n’en peux plus quand même, faudrait pas que ça dure !
– Je suis dans un état où je ne conteste plus. D’ailleurs, pourquoi faire ? Mon travail n’ennuie, ne m’intéresse plus. J’y viens mais je ne me sens pas impliquée du tout par la question. Je suis mal, mais je n’ai plus envie de lutter…
– Usée, je préfère rester à l’écart, tranquille. De toute façon, on ne me voit plus au travail. Et on voit encore moins ce que je fais. J’apprécierais volontiers un minimum de retour mais bon, faut pas rêver…

Ces 3 états psychologiques délétères au travail sont bien sûr le résultat de facteurs multiples et variés non exhaustivement décrits ici.
Néanmoins, leurs conséquences font toutefois courir un risque réel et concret à l’entreprise.
3 santés sont ici en jeu : la santé psychologique et physique du professionnel d’abord, puis celle économique de l’entreprise à laquelle il appartient.
Car si l’hyper-activité offre une « production personnelle » satisfaisante à première vue, il n’est pas écrit que cela dure longtemps… le corps a ses limites. De même pour les 2 autres visages où la situation peut rappeler celle du présentéisme, qui serait alors un « burn in », où les professionnels travaillent alors à 70% de leurs moyens… ouch ! (Voir mes précédents billets à ce sujet).

Comment faire croître son entreprise si l’un des leviers majeurs de création de valeur, l’homme, est entravé par sa mauvaise santé ?…

Tout ce que vous venez de lire est prévisible et peut donc être évité par anticipation.

La fierté du travail bien fait est un redoutable moteur de motivation intrinsèque !
Relancez-la en interrogeant sur « comment le professionnel conçoit le bon boulot » selon son point de vue, et ce dont il aurait besoin pour y arriver. Il n’est pas forcément question d’investissement lourd en matériel pour cela, mais plutôt d’un investissment collaboratif pour comprendre.

En tant que manager, ou coach, prenez conscience que c’est dans le fait de réussir à bien faire ce qu’on a à faire, qu’est le plaisir ! Ces questions doivent être discutées, sans juger pour libérer la parole, sans écarter ceux qu’on suppose désintéressés. La question du travail, de l’activité, est puissante en management.
Faîtes au mieux, avec justesse et sans jugement, c’est vous qui tenez le cadre des échanges, qui favoriserez l’émergence des solutions et arrangements communs.

Emmanuelle PERRIER

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Enquête dans la police sur le management et le travail : lancement juin 2011

Une enquête en 3 étapes sur 8 mois : espérons que le volontariat anonyme engage à répondre massivement. Rapport du CNRS de Toulouse à paraître en janvier 2010, à suivre.

Extrait de ma curation Stress et Travail.

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Banque : focus sur leurs conditions de travail

Très bonne initiative d’enquête anticipée du SNB-CFE CGC. Néanmoins n’enquêter qu’auprès d’adhérents ne comporte-t-il pas un biais ?

Article original
« Le SNB-CFE CGC alerte sur le climat de travail dans la banque » par Rejane Reibaud, Les Echos, 14 juin 2011.

Extrait de ma curation Stress et Travail.

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